avant et après

Chère Alice, je reviens d'un long voyage sombre, qui a duré deux mois. Depuis mon siège terne, j'envoyais Hunnin et Mugin parcourir le monde. Ils ne revenaient qu'au petit jour, épuisés par le bruit et par les souvenirs. Voilà longtemps que je n'avais pas connu ça, un tel désespoir, depuis peut-être mes vingt ans.

Je t'en dis rapidement la raison sans m'étendre: un homme est rentré chez nous, porté par le mensonge et les mauvaises intentions.

 

Mais aujourd'hui, dans la fenêtre de cette pièce où j'écris, je retrouve un petit goût de ciel, un défilement rapide des nuages gris sur fond blanc, et les toits de l'école enfin fermée. Le balancement de la cime de l'arbre dans le vent. T'as entendu comme il a soufflé la nuit dernière?

Pour la première fois depuis des années, les fêtes ont eu un certain goût de joie et de création. Guirlandes en papier, nappes en papier, sapin en papier, cadeaux faits maison ou quasi, petites danses simples mais endiablées, devant le feu, avec les enfants.

Pas de famille étendue.

 

Nous avons résolu de nous endurcir.

Quelque chose a volé en éclat.

Je le prends pur une initiation.

Maintenant il s'agit de reprendre le fil de ce que j'avais entamé il y a deux mois, avec la même joie, pondérée par ce que je sais de neuf (il était temps): le mal existe.

 

On se voit lundi ou quoi?

Si oui: j'amène du champagne.