Priorités

19 mai

 

J'ouvre l'oeil, il fait déjà bon. Vite, arracher les orties et les chardons avant midi, avant qu'il fasse vraiment chaud. Aujourd'hui, c'est la journée où je peux rattrapper le temps. Je dois répondre au courrier en retard (telle Gaston L), payer les factures, le loyer (de mai), remplir des documents administratifs très importants et très en retard. En arrachant les chardons, je me demande ce que pensait Anais Nin, à notre âge, en mai. Ca devient plus important que tout, je laisse tout tomber. Les papiers attendront, les factures, les vieux amis qui attendent affectueusement de mes nouvelles, ma mère....

Je cherche le livre, je lis. Comme un oracle, j'ouvre et je tombe sur l'été 39, la nouvelle de la déclaration de guerre. Elle dit: "La guerre était certaine. Une guerre d'horreurs et de ténèbres. Le drame, enfermé depuis des années dans les êtres humains, se donne maintenant libre carrière, cauchemars au grand jour, obsessions secrètes du pouvoir, cruauté, corruption. Une telle corruption ne peut se terminer que par un carnage. Je vois tout cela en parcourant les rues, et je n'ai pas le sentiment de partager le crime, mais il faudra que je partage le châtiment."

Je suis un peu déçue de ce que je trouve. Comme quand je pointe au hasard sur l'atlas pour savoir quel sera mon prochain voyage et que je tombe sur Dortmund. Non, pas tout à fait comme ça. Je suis un peu désolée pour moi aussi, à quoi puis-je servir si ma priorité absolue dans la vie est de savoir ce que quelqu'un pensait à la même période il y a 75 ans?

J'ai fait aussi un rêve qui me poursuis, c'était confortable: j'avais un ami. Ce qui m'étonne, c'est que je rêve presque toujours des deux même personnes.